1/2 Certificats médicaux et contestations

Juridique
1 Mar, 2022

Malgré leur importance pratique dans les relations de travail quotidiennes, les certificats médicaux ne sont traités aujourd’hui que par peu de dispositions légales. Dans ce premier article sur le sujet, notre partenaire CJE, Avocats Conseillers d’Entreprises, passe en revue les exigences légales et modalités relatives à ces documents officiels.

1. Exigences légales quant à la forme ou au contenu du certificat médical

Peu de dispositions légales traitent du certificat médical; malgré son importance pratique dans les relations de travail, le code des obligations (CO) n’en donne pas de définition. Le code de déontologie de la FMH précise à l’art. 34: «Les certificats médicaux, rapports et expertises sont des documents officiels. Le médecin les établit au plus près de sa conscience professionnelle et avec toute la diligence requise. Le but visé, la date et le nom du destinataire doivent figurer sur le document. Les certificats de complaisance sont interdits».

Le certificat médical est un document écrit qui selon la doctrine et la jurisprudence doit:

  • permettre d’identifier le·la patient·e (nom, prénom et date de naissance);
  • contenir exclusivement des faits médicaux objectifs constatés; personnellement et de manière indépendante par le médecin;
  • être conforme à la vérité;
  • indiquer la date à laquelle il a été établi;
  • mentionner les coordonnées complètes du médecin, sa spécialité et être signé par lui·elle.

La notion de certificat médical apparaît dans quelques dispositions légales et réglementaires parmi lesquelles on peut citer:

  • La LTr et ses ordonnances d’exécution (production d’un certificat médical pour l’engagement de jeunes gens; activités auxquelles les jeunes ne peuvent être occupés que sur présentation d’un certificat médical; présentation d’un certificat médical pour accorder un congé pour la prise en charge des membres de la famille ou du partenaire atteint·e dans sa santé; travail de nuit: le certificat médical d’aptitude, respectivement d’inaptitude, doit être délivré par un médecin du travail ou par un médecin qui dispose de compétences particulières en matière de santé au travail);
  • l’ordonnance du DEFR sur les activités dangereuses ou pénibles en cas de grossesse et de maternité OPMat;
  • la loi et le règlement sur l’assurance invalidité;
  • la loi fédérale sur l’assurance-chômage obligatoire et l’indemnité en cas d’insolvabilité LACI (le·la chômeur·se doit d’apporter la preuve de son incapacité ou de sa capacité de travail en produisant un certificat médical);
  • le règlement sur les allocations pour perte de gain RAPG concernant l’hospitalisation immédiatement après la naissance du nouveau-né.

2. Qui peut établir un certificat médical?

Les certificats médicaux sont en principe établis par des médecins, tout particulièrement le médecin traitant. La loi assimile les attestations délivrées par certains professionnels de la santé tels que les médecins dentistes ou les sages-femmes à des «certificats médicaux».

 

Toutefois, d’autres professionnel·le·s de la santé (par exemple psychothérapeute, infirmier·ère, physiothérapeute ou neuropsychologue) rédigent des attestations relevant de leur spécialité et sont parfaitement habilités à le faire. Bien que leurs écrits ne constituent pas des «certificats médicaux» au sens du Code pénal, ils·elles doivent également être conformes à la vérité, car à défaut ils·elles peuvent être sanctionné·e·s pénalement. (Bases juridiques pour le quotidien du médecin, Académie Suisse des Sciences Médicales – ASSM – 3ème édition révisée 2020, 6.4 Généralités concernant le certificat et le rapport médical)

L’employeur contrôlera donc que le certificat médical a été établi par un·e professionnel·le habilité·e.

3. Dans quelle langue le certificat médical doit-il être rédigé?

Les dispositions légales ne contiennent pas de règles concernant la langue dans laquelle le certificat médical doit être délivré. Par ailleurs, nous ne connaissons pas de convention collective de travail qui règle cette question. Au vu de ceci, nous sommes d’avis que l’employeur a la possibilité de régler cela dans le contrat de travail et ainsi, par exemple, de prévoir les règles suivantes:

  • le certificat médical doit être rédigé dans la langue dans laquelle le contrat de travail a été établi;
  • lorsque le certificat médical est rédigé dans une autre langue que celle du contrat de travail, le·la collaborateur·rice doit, à ses frais, fournir une traduction officielle légalisée.

Il faut relever que lorsque le certificat médical est établi à l’étranger, il y a un risque accru de complaisance dans la mesure où, en vertu du principe de la territorialité, le médecin étranger n’encourt aucune sanction pénale (faux certificat médical – art. 318 CP – et faux témoignage – art. 307 CP) puisque ces normes ne lui sont pas applicables.

4. Quelle rétroactivité du certificat médical peut être admise?

Le certificat médical est rétroactif lorsque le médecin atteste d’une incapacité de travail pour une date antérieure à celle de son établissement. Cela peut s’avérer problématique, car il est difficile d’attester avec certitude que l’incapacité de travail existait avant que le médecin n’examine le·la patient·e. Un certificat médical rétroactif de trois jours au maximum, soit le temps pour obtenir un rendez-vous chez le médecin, constitue la limite supérieure qui nous parait admissible. S’il est impossible d’éviter un certificat rétroactif, la transparence est particulièrement importante.

Le certificat doit répondre de manière compréhensible aux questions suivantes:

  • Quelles sont les constatations personnelles du médecin?
  • Le médecin s’est-il appuyé sur des indications du·de la patient·e ou de tiers pour certains aspects?
  • Quelle est l’évaluation du médecin?

Le médecin ne devrait pas confirmer une incapacité de travail antidatée lorsqu’elle n’est pas médicalement plausible. Un certificat médical rétroactif doit contenir la date du début de l’incapacité de travail, la date de son établissement, ainsi que celle du premier traitement ou de la première consultation (Arrêt du Tribunal administratif fédéral A-6410/2014 du 1er septembre 2015 consid. 4.3.4.2 et 4.3.4.3).

En tant qu’employeur, il convient d’être particulièrement vigilant en présence d’un certificat médical rétroactif lorsqu’il est délivré par un·e collaborateur·rice juste après son licenciement, lorsqu’il est établi le dernier jour du délai de congé ou lorsqu’il atteste d’atteinte psychique, car leur rétroactivité est difficile à prouver.

5. Un certificat médical délivré en ligne est-il valable?

Avec le développement des moyens de communication, des platesformes de consultation en ligne sont nées.

Par exemple, sur la plateforme SOIGNEZMOI.CH, il suffit de répondre à un questionnaire en ligne, puis un médecin vous appelle, détermine avec vous votre diagnostic et vous fait ensuite parvenir une ordonnance. La télémédecine permet de réduire le coût des consultations et est donc soutenue par les assureurs maladie.

Ces plates-formes peuvent non seulement délivrer des ordonnances, mais également des certificats médicaux d’arrêt de travail pour de courtes durées. Si cette pratique présente des avantages indéniables dans certaines situations, elle a l’inconvénient que le médecin n’a pas examiné physiquement le·la patient·e ce qui, pour des certificats médicaux peut poser la question de leur fiabilité.

Par ailleurs, le médecin qui émet le certificat médical ne connaît en général pas l’historique du·de la patient·e.

 

En conclusion, la rareté des dispositions réglant le certificat médical amène une certaine insécurité.
L’avantage de cette situation est qu’elle permet à l’employeur de prévoir des règles dans le contrat de travail.

 

Ce contenu a été rédigé par le cabinet CJE Avocats Conseillers d’Entreprises.

Pour ne rien rater, inscrivez-vous à la newsletter by Loyco.

Comme vous, nous détestons les spams ! Votre adresse e-mail n'est utilisée que pour vous envoyer notre newsletter et des informations sur les activités de Loyco.
À chaque envoi, vous disposez d'un lien de désabonnement inclus dans l'email.

Share This