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Gouvernance - Non classifié(e) | publié par Loyco | 24.06.2025

Moins de jours, plus d’effets: la semaine de 4 jours disséquée

Et si la semaine de 4 jours devenait un levier stratégique plutôt qu’une utopie sociale? Ce concept s’invite depuis plusieurs années déjà dans les débats autour du futur du travail, portée par une promesse audacieuse : celle de concilier performance, bien-être et engagement environnemental. Déjà expérimentée à grande échelle à l’international, elle reste marginale en Suisse. Pourtant, ses résultats ailleurs poussent à s’interroger. Faut-il repenser notre manière de travailler? Éléments de réponse.

De l’Islande au Japon, en passant par la Nouvelle-Zélande ou les États-Unis, de nombreuses expériences démontrent que travailler moins peut produire plus. L’organisation 4 Day Week Global, fondée par Andrew Barnes, a piloté une étude auprès de 91 entreprises réparties dans 5 pays (Australie, Canada, Irlande, États-Unis, Royaume-Uni), représentant 3 500 salarié·e·s. Les résultats : +35 % de chiffre d’affaires, hausse des embauches, réduction de l’absentéisme et meilleure satisfaction au travail et dans la vie privée (MIT Sloan Management Review, 2023).

Le principe repose sur la règle dite du 100-80-100: 100 % du salaire, 80 % du temps, 100 % de la productivité. Contrairement aux semaines « compressées » où les 40 heures sont réparties sur quatre jours, ce modèle implique une réduction effective du temps de travail, sans baisse de rémunération. Les entreprises sont invitées à repenser leurs processus pour gagner en efficacité plutôt qu’en intensité.

Mais ce modèle a déjà trouvé des déclinaisons très différentes selon les contextes. En Islande, depuis 2019, les horaires de travail de 90 % de la population active ont été réduits de 40 à 36 heures par semaine sans perte de salaire (Le Courrier International, 2024). Un progrès pour les femmes notamment.

«Une semaine de travail plus courte permet aux personnes – principalement des femmes – qui travaillaient 36 heures à temps partiel d’avoir un emploi à temps plein en conservant les mêmes horaires.»

Au Japon, la mairie de Tokyo propose aussi à ses fonctionnaires, depuis 2025, la semaine de 4 jours sans réduction du temps de travail et plusieurs grandes entreprises, telles que Microsoft Japan, ont testé le système. À l’origine de la démarche : une volonté, selon le contexte, de faire face aux nombreux burn-out ou de redresser la natalité, très basse dans le pays. En France, depuis 2024, la fonction publique expérimente une version de la semaine en quatre jours, en répartissant les heures hebdomadaires, soit 35 heures, sur moins de jours, tout en préservant le total annuel.

En Suisse, le modèle reste embryonnaire. Les grandes entreprises, telles que Novartis ou Roche, privilégient d’autres formes de flexibilité (temps partiel, horaires annualisés) et soulignent que la semaine de 4 jours, à salaire inchangé, nécessite des gains de productivité pour être viable. Selon l’Office fédéral de la statistique, le travail à temps partiel est déjà largement répandu, notamment chez les femmes, ce qui rend l’introduction d’un nouveau modèle plus complexe à standardiser.

Et pourtant, la Suisse a désormais rejoint l’initiative de l’organisation 4 Day Week. Dans ce cadre, l’entreprise de consultation zurichoise Hailperin et le département Gestion de la Haute École spécialisée bernoise (BFH) collaborent depuis le début de l’année pour lancer une étude pilote sur la semaine de travail de quatre jours en Suisse. L’objectif : examiner scientifiquement les effets de la semaine de quatre jours sur les entreprises et leurs employés pour démontrer concrètement que cette nouvelle organisation du travail peut être mise en œuvre avec succès dans les entreprises helvétiques. Affaire à suivre donc.

En Suisse, quelques PME pionnières expérimentent déjà la semaine de 4 jours. C’est le cas de Seerow, une entreprise IT soleuroise qui a instauré une semaine de 32 heures à rémunération constante. Selon Fabian Schneider, le directeur,

«Les journées sont intenses [mais] nous sommes mieux organisés et plus productifs».

Autre exemple, 23bis, une agence créative lausannoise, fonctionne depuis deux ans sur ce modèle. Les salarié·e·s y travaillent 32 heures sur quatre jours, avec un vendredi libre et un salaire inchangé. L’entreprise y voit un outil de cohésion, de durabilité et de fidélisation des talents.

Enfin, Glutform Rüegg SA, active dans la construction de poêles et cheminées, a également franchi le cap en réduisant son horaire à 36 heures réparties sur quatre jours avec des résultats positifs à la clé.

La réduction du temps de travail pousse les entreprises à optimiser leurs priorités, à digitaliser certaines tâches, et à renforcer la collaboration. Plusieurs structures soulignent:

  • Une productivité accrue, liée à la focalisation sur les tâches à forte valeur ajoutée.
  • Une amélioration de la satisfaction, tant au travail que dans la vie personnelle, favorisant le bien-être psychologique. Avec, selon le rapport du MIT, une diminution notable du burn-out et un gain moyen de 42 minutes de sommeil par semaine. Les collaborateurices indiquent dans ce rapport avoir pu consacrer davantage de temps à leurs enfants (avec une augmentation de 22% pour les hommes) et à de l’exercice physique.
  • Une attractivité RH renforcée, avec un positionnement différenciant sur le marché du travail.
  • Une baisse de l’absentéisme, qui démontre une meilleure santé générale et un engagement accru des collaborateurices.
  • Une contribution environnementale mesurable, notamment par la réduction des déplacements domicile-travail.

Le modèle n’est pas sans contraintes. Il implique une réorganisation profonde des plannings, des process et de la culture d’entreprise. Certains secteurs (santé, commerce de détail, services continus) peuvent rencontrer des difficultés d’application. Le risque de surcharge sur 4 jours existe, tout comme les tensions potentielles entre métiers compatibles et non compatibles avec ce modèle.

Par ailleurs, les coûts engendrés par l’adoption d’un tel modèle sont à prendre en considération. La réorganisation de la gestion du personnel peut en effet entraîner des coûts additionnels pour l’entreprise. Il en va de même pour le maintien du niveau de salaire malgré la réduction du temps de travail. Par exemple, certain·e·s collaborateurices travaillant à temps partiel (80 %) pourraient augmenter leur taux d’activité, augmentant ainsi les charges salariales à court terme.

Néanmoins, si la réduction des heures de travail conduit à une augmentation de la productivité, l’impact positif sur les résultats financiers de l’entreprise peut compenser ces pertes. La réduction du turnover pourrait également diminuer et les coûts liés au recrutement et à la formation de nouveaux employés.

Précisons enfin que, comme le mentionne l’étude du MIT mené à l’échelle mondiale dans 91 entreprises, obtenir l’adhésion des employés est crucial pour le succès de cette initiative. Les employé·es doivent être encouragés à proposer des idées pour réduire les heures de travail tout en maintenant l’efficacité.  Il mentionne aussi qu’il est essentiel de rassurer les employé·es sur le fait que la réduction des heures de travail ne s’accompagnera pas d’une baisse de salaire. Plus globalement, une communication claire, un cadre flexible et un accompagnement managérial solide sont indispensables pour réussir la transition.

Dans une organisation agile comme la nôtre qui a toujours priorisé le bien-être des collaborateurices, la semaine de 4 jours est une option qui est envisagée. Un groupe de travail s’est donc constitué afin de trouver la meilleure manière de l’appliquer chez Loyco. Un test va d’ailleurs prochainement être mené sur six mois dans l’une de nos plus grandes équipes.

Comme nous l’avons fait pour notre modèle de management, inspiré de l’holacracy, nous avons imaginé une solution adaptée à nos besoins. La proposition du groupe de travail, qui correspond le mieux à notre contexte et qui s’est basé sur les résultats d’un questionnaire adressé à l’équipe concernée, est la suivante:

  • Réduire les heures hebdomadaires de travail par semaine pour un emploi à plein temps (100%).
  • Proposer l’aménagement du temps de travail, ce qui ouvrirait plusieurs options pour un employé travaillant à temps plein, telle que, notamment:
  1. Continuer de travailler sur cinq jours, mais avec une moyenne journalière de travail réduite
  2. Condenser la semaine de travail sur 4 ou 4.5 jours

Nous verrons quelles conclusions ressortent de ce test!

La semaine de 4 jours n’est ni une baguette magique ni une solution universelle. Mais elle incarne un changement de paradigme dans notre rapport au temps, à la productivité et au bien-être. Si elle reste marginale en Suisse, les expériences concrètes menées ici et ailleurs montrent qu’elle est tout sauf un gadget.

Et si on commençait, simplement, par poser la question dans nos organisations?

NDLR: Cet article a été rédigé en français et traduit de manière automatique en anglais et en allemand.